Brevet unitaire : un accord pas nécessairement final

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Le 1er décembre 2011, la commission des Affaires juridiques du Parlement européen a publié un communiqué de presse se félicitant que le brevet unitaire ait abouti à un « accord final » entre le Conseil de l'Union européenne et les rapporteurs du Parlement européen. Pourtant, les problèmes déjà soulevés par l'April, et notamment les questions de légalité de la solution retenue1, continuent de faire débat. Les inquiétudes sur les pouvoirs accordés par le projet à l'Office européen des brevets, connu pour ses tentatives de légalisation des brevets logiciels2, ne semblent pas non plus avoir été prises en compte.

Mise à jour : nous nous sommes procuré une fuite du compromis (en anglais) qui confirme notre analyse que les sérieux problèmes soulevés quant à la base juridique du règlement ont été ignorés et que la demande du microcosme des brevets que la Cour de justice de l'Union européenne reste la plus éloingnée possible du droit matériel des brevets a été rejetée.

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L'absence d'évolution est préoccupante à plusieurs titres. En effet, durant ces négociations à huis clos, le microcosme des brevets a tenté d'imposer la mise en place d'une juridiction d'exception, par le biais de Lord Jacob et par la voix de l'eurodéputée Cecilia Wikström3. La mise en place d'une telle juridiction reviendrait à abandonner au microcosme des brevets le pouvoir de faire le droit en terme de brevetabilité, au détriment des instances démocratiques, et lui accorderait la possibilité de légaliser les brevets logiciels, nocifs pour l'innovation et les entreprises. Cela remettrait également en cause l'idée d'un procès équitable, puisque les mêmes personnes pourraient être à la fois juges et parties.

De plus, le projet soulève de nombreux problèmes de conformité avec les traités européens et, s'il devait être déclaré non conforme, cela créerait une importante incertitude juridique. Le problème est le suivant : dans le communiqué de presse du Parlement européen, il est affirmé que le brevet unitaire serait un titre de l'Union européenne, un « brevet communautaire », ce qui implique que les règles sur les brevets doivent se soumettre au droit européen. Cela n'est pourtant pas prévu dans le texte. Nous avons proposé des amendements corrigeant cette carence mais, selon nos informations, ils n'ont pas été examinés lors des négociations ayant abouti à cet « accord final ». Il est donc essentiel que de tels amendements soient adoptés par le Parlement, qui ne s'est pas encore prononcé sur le sujet, et dont le vote ne saurait constituer qu'une simple formalité entérinant un accord négocié à l'abri de tout regard. N'hésitez donc pas à contacter vos députés avant le vote en commission des Affaires juridiques, les 19 et 20 décembre 2011.

Cet article a initialement été publié sur le site web de l'April.